Tension dans les métiers de la transition énergétique

Jean-Philippe Burtin, CEO borea nous partage son expertise dans un entretien accordé au Salon BePositive.

Pourquoi, y a-t-il de si grandes difficultés de recrutement dans ces secteurs ?

Les raisons sont multiples. D’abord, certains des métiers demandés pour accompagner la transition énergétique restent encore assez méconnus. Ensuite de nombreuses formations ne sont pas remplies à 100%, rallongeant ainsi l’arrivée sur le marché de nouveaux talents.

Enfin, certains métiers, comme par exemple, les techniciens exploitation et maintenance de parcs de production d’EnR, qui nécessitent une mobilité importante restent encore assez peu attractifs. Ce sont pourtant des métiers qui ont un fort potentiel d’évolution lié à l’innovation des technologies.

Face à ces difficultés, les entreprises ont changé leur politique de rémunération pour s’adapter au marché. Par exemple, des salaires bruts fixes atteignant à présent la fourchette de 42 – 48 000 €/an sont courants pour un chef de projet avec trois ans d’expérience, alors qu’en 2019 il fallait sept ans d’expérience pour atteindre ce même niveau.

 

Qu’en est-il des formations au regard des attentes du marché de l’emploi dans les EnR ?

Les structures de formations initiales sont globalement en phase avec les attentes du marché. Mais il faut leur donner plus de visibilité et surtout inviter les jeunes à s’engager davantage dans ces filières. D’abord parce qu’elles seront durablement pourvoyeuses d’emplois et aussi parce qu’elles sont en phase avec les nouvelles aspirations que cherchent les jeunes diplômés. 

Dans le secteur de l’hydrogène, par exemple, on est aujourd’hui à 6 000 emplois directs, 100 000 sont envisagés d’ici 2030 si l’on en croit les orientations prises par l’Etat pour soutenir la filière. 

Alors, comment rendre ces secteurs plus attractifs ?

Selon une enquête que nous avons menée sur 100 recrutements, la rémunération n’arrive qu’en troisième position dans les motivations des candidats, derrière le sens, les valeurs de l’entreprise et les conditions de travail.  Avant de s’engager, les jeunes se renseignent beaucoup en amont sur la culture de l’entreprise, l’ambiance de travail et le sens de la mission… Il est indispensable de proposer 1 à 2 journées de télétravail par semaine et d’être flexible dans la gestion du temps : le bien-être du salarié est devenu central. Les employeurs doivent cultiver leur marque autour de ces valeurs pour être attractifs.

Mais on ne peut pas compter uniquement sur les nouveaux entrants sur le marché du travail pour satisfaire la montée en charge des besoins des entreprises. On a besoin aussi du monde d’avant pour construire le nouveau.

 

Vous évoquez le transfert de savoir-faire issus des énergies conventionnelles ?

Oui, bien sûr. Un chef de projet travaillant dans les énergies conventionnelles dispose déjà de compétences avérées, et peut moyennant une formation courte s’acculturer aux enjeux et exigences du secteur des énergies renouvelables. En raison de la tension sur certains métiers, nous invitons nos clients à faire évoluer leurs critères de recrutement et à passer d’un recrutement basé sur le diplôme et l’expérience ciblée, vers un recrutement fondé sur les compétences connexes et le potentiel de réalisation. L’ADEME prévoit que la transition énergétique va générer la création nette de 500 000 emplois à l’horizon 2030. La compétence et la formation sont les enjeux clés pour y parvenir. Tous les leviers et opportunités d’attirer des compétences et des talents dans les énergies renouvelables doivent donc être mobilisées.